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Les eaux de l'hétérodoxie, par  Charles Eisenstein

12.2.2025 Au sein du dossier sur l'eau structurée (ou cohérente, cristalline liquide, polymérisée, morphogénique, ZE alias ez-water en anglais), j'ai enfin trouvé ce que je cherche depuis quelques mois: un exposé qui offre une vision large. J'ai traduit une longue recension par Charles Eisenstein du livre de Pollack « The Fourth Phase of Water ». Il y explique pourquoi cette nouvelle biologie de l'eau peine à se faire connaître.

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Ce billet fait suite au billet premier, de juin 2024: Eau cristalline liquide ou E-z water à la Gerald Pollack

 

Ci-dessous ma traduction janvier 2025 de Les eaux de l'hétérodoxie, par  Charles Eisenstein, novembre 2014 - qui est sa recension du livre de Pollack « The Fourth Phase of Water ». Cet ouvrage existe en français sous le titre "Le Quatrième état de l'eau - au-delà de liquide, solide et vapeur", traduit en 2019. J'ai gardé le titre anglais dans le texte traduit, puisque c'est la version qu'a utilisée Eisenstein pour son analyse. Je ne sais ce qui a été ôté ou ajouté dans la version française.

Cet essai a été traduit en Chinois et en Allemand.

Une recension du livre de  Gerald Pollack  « The Fourth Phase of Water »

Dans « The Fourth Phase of Water », Gerald Pollack propose une nouvelle théorie élégante de la chimie de l'eau qui a des implications profondes non seulement pour la chimie et la biologie, mais pour le fondement métaphorique de notre compréhension de la réalité et de notre traitement de la nature.

Permettez-moi de souligner que ce n'est pas un livre New Age écrit par un auteur aux  références scientifiques douteuses. C'est un livre sur la chimie, bien qu'il soit facilement accessible aux profanes. Pollack est un professeur hautement décoré à l'Université de Washington, auteur de nombreux articles évalués par des pairs, récipiendaire de la médaille Prigogine 2012 et rédacteur en chef de la revue académique Water. Cela doit être mentionné, car,  dans un domaine imbibé de ce que certains appellent la pseudo-science, ce que j'appellerais poliment une recherche spéculative peu préoccupée par la rigueur scientifique, les théories qui brisent les paradigmes attirent un degré démesuré d'hostilité.

Pollack consacre l'un des premiers chapitres à deux de ces épisodes: la débâcle « Eau polymérisée» (polywater) des années 1960 et la controverse sur la mémoire de l'eau, vingt ans plus tard. Ceci éclaire une partie de la politique de « la science comme institution » et des moyens par lesquels les opinions dissidentes sont supprimées. En outre, comme je vais l’aborder plus tard, ces évènements mettent au jour que la science telle que nous la connaissons repose sur de sacro-saintes hypothèses métaphysiques sous-jacentes – hypothèses que le présent livre viole indirectement. Il n'est donc pas étonnant qu'il ait rencontré une réception mitigée, dans certains cas décidément froide, dans les milieux scientifiques. Malgré tout cela, « The Fourth Phase of Water » évite les histoires de hurlements ou de persécutions qui colorent parfois des livres hétérodoxes. Le ton est courtois, conversationnel et prudent lorsque Pollack présente des idées plus spéculatives.

On pourrait penser qu'après deux cents ans ou plus de chimie moderne, on aurait compris quelque chose d'aussi fondamental et apparemment simple que l'eau . Avant de lire ce livre, je prenais pour acquis ce que mes manuels scolaires expliquaient quant à  l'évaporation, l'action capillaire, le gel, la formation de bulles, le mouvement brownien et la tension superficielle. Tout le monde émet les mêmes suppositions que moi, ce qui peut expliquer pourquoi les dogmes conventionnelles sont rarement examinées. Cependant, comme le démontre « The Fourth Phase of Water », un petit examen créatif révèle de graves lacunes dans les explications classiques.

Le concept crucial dans le livre est celui de “l’eau de zone d'exclusion eau,” ou eau-ZE  pour faire court. Imaginez un bécher d'eau dans lequel des centaines de milliers de microsphères de plastique sont suspendues. La chimie standard s'attendrait à ce que ceux-ci soient répartis uniformément dans ce milieu – et qu'ils soient dans la majeure partie de l'eau. En réalité, le long des parois du bécher (et de toute surface hydrophile immergée dans l'eau), l'eau reste claire, exempte de sphères. Pourquoi? La chimie standard prédit qu’une zone d'exclusion de quelques molécules d'épaisseur pourrait exister le long des parois, où les molécules d'eau polaires collent aux charges distribuées, mais la zone d'exclusion observée Pollack est d'au moins un quart de millimètre – plusieurs centaines de milliers de molécules d'épaisseur.

Pollack et ses collègues ont procédé avec prudence, testant et éliminant finalement diverses explications conventionnelles du phénomène (par exemple, flux convectifs, brossage de polymères, répulsion électrostatique et matériaux qui fuient). Ils ont également commencé à étudier les propriétés de la zone d'exclusion, avec des résultats intrigants: L'eau-ZE exclut presque tout, non seulement les particules en suspension, mais aussi les solutés. Elle présente un pic d'absorption électromagnétique à 270nm, et émet moins de rayonnement infrarouge que l'eau libre ; par rapport à laquelle elle  a une viscosité plus élevée et un indice de réfraction plus haut. Plus surprenant encore, ils ont découvert que la zone d'exclusion avait une charge négative nette et que l'eau à l'extérieur des zones avait un pH faible, indiquant que des protons avaient été éjectés de l'eau-ZE.

Riches de  cette information, Pollack et ses collaborateurs ont émis l'hypothèse que la zone d'exclusion est composée d'une eau sous forme cristalline liquide, constituée de couches hexagonales empilées, où   l'oxygène et  l'hydrogène sont dans un rapport de 2:3. Certes, la glace est également constituée de feuilles hexagonales empilées, mais elles y sont maintenues ensemble par les protons supplémentaires. Pollack propose que les feuilles ZE sont “hors du registre” – alignées de sorte que les oxygènes de chaque couche sont fréquemment à côté des hydrogènes des couches adjacentes. L'alignement n'est pas parfait, mais il crée plus d'attraits que de répulsions, assez pour créer de la cohésion ainsi qu'une matrice moléculaire suffisamment serrée pour exclure même les plus petits solutés.

D'où vient l'énergie pour créer cette séparation de charge? Elle provient du rayonnement EM incident. Lorsqu'un échantillon d'eau est protégé du rayonnement entrant et du flux de chaleur, aucun ZE ne se forme.

La majeure partie de « The Fourth Phase of Water » est consacrée à l'application de cette hypothèse à divers phénomènes de la chimie de l'eau. Dans mon esprit, sa plus grande force en tant que scientifique est de poser des questions apparemment naïves que personne d'autre n’ose. Par exemple, il s'interroge sur l'explication classique de la tension superficielle, qui invoque la pression de liaison de l'hydrogène sur la surface de l'eau. La tension superficielle extraordinaire de l'eau pourrait-elle vraiment s'expliquer par l'énergie d'une couche de moins d'un nanomètre d'épaisseur? Il demande pourquoi l’eau ne fuit pas des gels qui peuvent contenir plus de 99,9%? Pourquoi les gouttelettes d'aérosol chargées d'eau coalescent-elles en nuages au lieu de se repousser et de se disperser uniformément dans le ciel? Pourquoi l'eau chaude gèle-t-elle parfois plus rapidement que l'eau froide (l'effet Mpemba)? Pourquoi la vapeur  monte d'une tasse de café chaud en bouffées discrètes? Pourquoi les bateaux laissent-ils un sillage d'eau relativement immobile derrière eux parfois 15 ou 30 minutes après le passage?

Ce livre offre des réponses extraordinairement efficaces à ces questions et plus encore. Les expériences qu'il cite sont simples et convaincantes. Bien qu'il offre des réponses très peu conventionnelles aux questions de base en chimie, il n'invoque pas de forces surnaturelles ou paranormales. Il ne remet pas non plus en cause les lois physiques fondamentales (de thermodynamique, de relativité, de théorie quantique, etc.). On ne peut s'empêcher de se demander pourquoi sa théorie est-elle ignorée.

Je pense que la raison va au-delà de la résistance kuhnsienne standard aux changements de paradigme. Après tout, Pollack n'est pas le premier scientifique à rencontrer des obstacles pour avoir avancédes théories sur l'eau qui suggèrent qu'elle est plus qu'une substance générique, sans structure, plus qu'un milieu ou un ingrédient brut pour la chimie.

Un rapide examen de l'histoire des deux controverses mentionnées plus haut, l’épisode de leau polymérisée (polywater) et celui de la mémoire de l'eau , est instructif. Dans le premier cas, les chimistes russes ont découvert que, dans des tubes étroits, l'eau présentait des propriétés anormales, ni liquides ni solides (les anomalies sont exactement les mêmes que celles décrites par Pollack). Un tumulte a suivi la publication :  les scientifiques occidentaux  accusaient les Russes de ne pas éliminer les impuretés de l'eau – à savoir, des traces de silice dissoute dans les tubes de verre. En fin de compte, les Russes ont admis que l'eau était impure et la découverte a été reléguée à la poubelle de l'histoire. Personne, cependant, n'a offert une explication de la façon dont la silice dissoute pourrait expliquer ces propriétés anormales. Pollack souligne que l'eau vraiment pure, le solvant universel, est presque impossible à obtenir.La substance de la découverte des Russes n'a jamais été considérée; on a préféré trouver  un prétexte commode  pour la rejeter.

Le cas de la mémoire de l'eau est encore plus flagrant. En 1988, Jacques Benveniste a publié un article dans Nature, où il  affirmait qu'un échantillon d'eau qui avait autrefois contenu des anticorps évoquait encore une réponse immunitaire des globules blancs, comme si l'eau “se souvenait » de leur présence. Nature a publié l'article (Benveniste était un immunologiste français), mais a ensuite envoyé une équipe inquisitoire  , qui comprenait le magicien professionnel James Randi et le détecteur de fraude Walter Stewart. Les compte-rendus diffèrent quant à ce qui s'est passé ensuite, mais tout le monde admet qu'aucune preuve directe de fraude n'a été trouvée. L'équipe a  conclu que les résultats n'étaient pas reproductibles,  affirmation que Benveniste a vigoureusement démentie, en vain: son financement a été annulé, son laboratoire lui a été enlevé et sa carrière universitaire a été ruinée. À ce jour,son nom est associé à la science pathologique et à l'assassinat médiatique de personalités.

Remarquez comment, dans le paragraphe précédent, j'ai mis le mot “souvenait ” entre guillemets,   pour assurer au lecteur que je ne pense pas que l'eau pourrait littéralement avoir des souvenirs. Les guillemets impliquent que l'eau ne peut, au mieux, se comporter que comme si elle pouvait s'en souvenir. Parce qu’ après tout c'est juste de l'eau, non? Elle  ne possède pas la complexité, l'organisation, l'intelligence, l'être expérientiel qui serait nécessaire pour avoir des souvenirs réels. La chimie moderne tient à ce principe que l'eau est un fluide générique, dont deux échantillons sont fondamentalement identiques, ne différant que par la température et la présence d'impuretés (et les rapports isotopiques de l'hydrogène, ajouté-je pour vous, lecteurs pointilleux).

L’eau polymérisée, la mémoire de l'eau et la théorie de Pollack mettent à mal  ce principe, qui est en réalité la marque d’une sorte d'anthropocentrisme. Notre civilisation, en particulier dans son traitement de la nature et dans  son économie marchande, opère par l'hypothèse que nous seuls, les humains, avons les qualités d'un soi. Le reste du monde n'est qu'un tas de choses; par conséquent, nous sommes libres de l'exploiter comme nous le voulons, d'imposer notre intelligence à ces substrats insensés. Toute théorie ou technologie scientifique qui viole ce principe ne peut que sembler fausse, voire scandaleuse, à l'esprit qui opère selon ces présupposés.

Une façon de voir la transition que notre société subit aujourd'hui, c'est que nous attribuons l'auto-soi à de plus en plus d'êtres que nous  considérions comme « autres » dans le passé. Nous avons fait quelque progrès : aujourd'hui, nous reconnaissons aux femmes et aux minorités raciales le statut de personne à part entière (même si les croyances racistes et sexistes vont bien au-delà de ce que la plupart des hommes blancs reconnaissent). Nous ne voyons plus les animaux comme des brutes , bien que, encore une fois, la manière et le degré d'intelligence animale soient mal compris. Même l'intelligence végétale émerge comme un sujet de recherche brûlant, bien que rare soit le scientifique   qui oserait un «  plantes sont intelligentes » ou « les plantes ont une expérience subjective” sans offrir une série de précautions oratoires comme « certes, je n’affirme pas qu'elles sont réellement intelligentes. »

Gerald Pollack non plus ne dit pas que l'eau est intelligente. Ses recherches ouvrent cependant la porte à une telle vision, car elles impliquent que deux « échantillons » de H2O pur sont uniques, avec une structure qui dépend de ce avec quoi ils ont été en contact. Pourquoi ai-je mis “échantillon” entre guillemets? Le mot-même implique que, si je prends une petite quantité d'eau d'une plus grande quantité (disons que je prelève l’eau d’une baignoire dans un tube à essai), le plus petit aura les mêmes propriétés que le plus grand. En d'autres termes, cela implique que l'eau, ou tout ce qui est échantillonné, est fondamentalement isolable de son environnement.

La recherche de Pollack remet en question les deux hypothèses :– uniformité et isolabilité. Il ne va pas jusqu'à prétendre que l'eau peut transporter des informations, mais il se rapproche quand il observe que les propriétés de l’eau-ZE diffèrent pour différents matériaux. C'est peut-être la raison pour laquelle les homéopathes se sont emparés de ses recherches (comme ils l'ont également fait avec celles de Benveniste). Aux yeux de l'orthodoxie médicale, l'homéopathie est la quintessence même du charlatanisme; son association avec le travail de Pollack(bien qu'il ne fasse jamais de liens, lui-même) est sûrement l'une des raisons pour lesquelles l'establishment scientifique se méfie de son travail.

Aucun observateur sobre ne dirait qu'il a “prouvé” la validité de l'homéopathie, ni celle des foisons de produits à base d'eau que l'on peut trouver sur le net. Mais si nous acceptons ses résultats – et j'espère que d'autres scientifiques répèteront et étendront ses expériences – au moins on ne pourra plus dire que ces modalités contredisent des principes scientifiques indubitables. Si deux échantillons d'eau pure sont identiques, les produits  et médicaments à base d'eau structurée sont de la foutaise. Grâce à Pollack (et à une lignée d'autres chercheurs qu'il a repérés dans la littérature scientifique), ce n'est plus certain.

L’ouvrage « The Fourth Phase of Water » contribue à un changement de paradigme   important qui se déroule à l’heure actuelle dans toutes les sciences, et  à une transition dans notre mythologie  civilisationnelle. Rien qu’en science, si les implications de ses découvertes sont vérifiées, elles sont profondes, particulièrement dans les domaines comme la biologie cellulaire, la physiologie végétale, la signalisation chimique, et naturellement la médecine. Au-delà de cela, elles érodent le narratif qui voudrait que nous vivons dans un univers mort, fait  de substances génériques, dont nous, la seule intelligence de cet univers, sommes les seigneurs et maîtres légitimes. Pollack fait partie de l'évolution de la science vers une vision du monde plus chamanique, qui admet que toutes les choses possèdent une forme d'être.

C’est peut-être parce que ses conséquences sont si énormes  que la résistance à ce changement est encore forte,. Même sans se rendre compte de l'énormité des implications, les penseurs orthodoxes attaquent instinctivement tout travail qui est aligné avec cette transition. Une tactique courante consiste à alléguer la contamination qui (avec la fraude) est utilisée pour rejetter comme nuls des résultats anormaux, en archéologie et même en astronomie ainsi qu'en chimie. Cela équivaut à une accusation de négligence, d'incompétence. Personne ne veut passer pour un dupe et, lorsque débute l'ostracisme des iconoclastes tels que Benveniste, Pollack, Pons et Fleischmann, Halton Arp, etc., ceux qui leur sont secrètement sympathiques gardent le silence, craignant à juste titre pour leur financement et leur carrière.

Bien que je soupçonne   Gerald Pollack de ne pas être opposé à une transition dans notre mythologie de civilisation, j’en ai vu peu de signes  dans le livre. Il se limite à la chimie et, lorsqu'il s'aventure dans le domaine de la spéculation, il indique clairement qu’il prend des risques. Il se peut que son ton peu amateur de sensationnel, son accueill des explications alternatives, et son attachement à n’affirmer que sur base  expérimentale aideront à  apaiser le scepticisme naturel du lecteur orthodoxe au plan scientifique. Mais j'en doute. Les implications radicales de ce travail frappent trop près du but, et trop profondément.

Rappel de la source: https://charleseisenstein.org/essays/the-waters-of-heterodoxy-g-pollacks-the-fourth-phase-of-water/


 


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