Un "documentaire" a paru sur Netflix, tout à la gloire du véganisme, que je présenterai demain sous ses atours de propagande pseudo-scientifique.
Merci pourtant à James Cameron, le réalisateur, et à Netflix, le diffuseur. Même si le contenu est très douteux, le choc des images et la parole des intervenants "scientifiques" sont plus parlants que tous nos blogs de nutri-fans pour qu'enfin la plupart de nos congénères s'interrogent: d'où vient ma nourriture? quel impact sa production a-t-elle sur ma planète? sur ma santé? Merci d'ouvrir les yeux d'une majorité de citoyens un peu distraits, qui ne se préoccupent pas de ce qu'ils mettent dans leur assiette. Pour autant, cela vaut-il la peine de présenter comme "documentaire" un show de magicien, dissimulant et faisant apparaître des colombes à volonté? Si ce n'est pour nourrir un nouveau mythe, qui pourrait faire bouger l'humain...
L'humain tient en groupe grâce aux mythes et aux légendes, depuis les vastes mythes sur l'existence d'un ou de plusieurs dieux jusqu'aux mythounets comme celui qui veut qu'un gars peut marcher sur l'eau, notre mythe catho par excellence. Dans dix ou vingt ans, on découvrira peut-être que la grande vague végane aura eu comme bénéfice d'éveiller quelques consciences endormies - non seulement face à la condition animale et notre statut d'urbain, mais aussi face à l'impact d'une alimentation-remède sur notre santé défaillante. C'est un peu dommage que les dégâts collatéraux soient majeurs, mais bon c'est la finalité de notre vie ici bas: on sert de chair à canon pour des enjeux supérieurs.
Dégâts collatéraux? Peu me chaut l'athlète qui perd ses performances depuis qu'il joue avec l'équipe végane. Je pense plutôt à tous ces jeunes ados, encore sensibles et peu formés à la critique, qui sont chamboulés par les vidéos et les discours aberrants de nos antispécistes et se ruent dans la farce anti-source animale. Je pense aussi à ces jeunes mamans véganes inconscientes que les carences in utero mettent en péril l'équilibre de leur gamin à naître de manière irréversible, ce qui a été largement démontré dans les études. Je pense bien sûr à ces enfants qu'on force à manger végane sans leur demander leur avis, eux qui sont à la merci de parents autoritaires. Heureusement que, de l'avis même des mouvances véganes, 85% de leurs ouailles ne respectent pas le cahier des charges et font des écarts régulièrement.
La nutrition n'est pas une science, ce n'est même pas un art pour la plupart, c'est une religion, soutenue par des rites et des mythes. D'où peut-être l'utilité d'avoir joué sur la mythification de la condition animale pour faire bouger les masses.
J'aimerais renaître dans 100 ans et pouvoir faire mon petit Henri Guillemin sur nos années de grande confusion, le débat sur la condition animale n'étant qu'une manifestation de ce "tout-vaut-tout" actuel. Ecoutez-le, par exemple ici sur "l'autre avant-guerre", recadrer les légendes & mensonges de l'Histoire de France, avec bienveillance et un oeil critique. Le soir, à choisir entre Netflix et Guillemin, c'est vite fait: la parole de Guillemin vaut toutes les séries modernes. Légendes? Vous croyez, comme je le croyais, que la Révolution de 1789 était un mouvement populaire, de défense du peuple? Naïve que j'étais... Avec quelle maestria il nous démontre comment les politiques détournent habilement l'attention du grand public pour faire passer leurs désirs! Si j'étais prof' en sciences po, ses conférences seraient au programme tant elles sont limpides.
Le couple de la blaguounette en début de billet est illustratif de ce que j'essaie de transmettre dans ce dossier. Ils se rendent dans un lieu de joie, de partage, de convivialité, d'enchantement des papilles (le restau) mais y déposent leurs angoisses de mort profondes (le manger-sans). La réponse de la serveuse est logique: changez de crémerie, vous vous trompez de bataille. Ce qui introduit un autre billet encore, sur la nutrition comme religion et sur les choix de diètes extrêmes comme manifestation du désespoir et du déni - depuis le "manger sans gluten et sans raison" jusqu'au végétalisme ou à la diète cétogénique sans prescription.
Demain, on fera un petit tour dans l'arène de la désinformation par l'image, miam miam!