23.2.24 Je cherche des correspondants auxquels je pourrais rattacher ces lecteurs qui n’ont pas assez confiance en eux-mêmes pour écouter le feedback de leur propre organisme. Aujourd'hui: une figure médiatique scientifique en Grande-Bretagne, le docteur Tim Spector.
Consciente de ce que la parole d’une profane, certes cultivée en nutri, ne vaut rien par rapport à celle d’un docteur ou d’un professeur, je cherche des correspondants auxquels je pourrais rattacher ces lecteurs qui n’ont pas assez confiance en eux-mêmes pour écouter le feedback de leur propre organisme. En effet, je prône une alimentation intuitive où le mangeur s’écoute vraiment et définit son propre mode alimentaire sur la base d’observations calibrées. Le cas échéant, il peut suivre une forme de cure de quinze jours, au sortir de laquelle le mangeur conscient sent si fort les changements physiologiques et psychologiques qu’il est prêt à s’écouter. Enfin, soyons francs : certains mangeurs sont prêts, d’autres ont encore besoin d’écouter ce que dit « le médecin ».
Si ces médecins que je relayerais sont en outre des figures médiatiques, le rapport d’autorité est encore plus fort. Je gage que le mangeur peu sûr de lui se sentira l’envie de changer son mode alimentaire en fonction de ce discours.
La difficulté est précisément le contenu du discours. Je trouve peu de maîtres à penser qui, même s’ils tancent l’algèbre nutritionniste ambiante, ne tombent pas, en fin de conférence, dans la triste ornière de pensée commune : « bien sûr, la base est de manger beaucoup de végétaux, d’arrêter la viande et le beurre ».
Je passe sous silence les quelques chefs de file que j’ai relayés au fil des topos, selon le thème que j’explore. Ces derniers sont souvent des extrémistes, comme Mark Sisson pour la paléo, dans mon topo "Paléo: le bon plan". Cet extrémisme est utile pour entrer dans cette forme de cure qui poussera les cellules du mangeur à lui dire ce qu’elles pensent, car – on y reviendra – il ne faut pas négliger la part magique de la réforme alimentaire. En monde magique, on a besoin de sorciers ;)
Au principal, ma préférence va vers des esprits méthodiques et rigoureux, documentés. Je leur ajoute ma part empirique, de praticienne de terrain.
Je n’imposerai jamais mes vues. Vive la diversité des points de vue, à chacun sa voie. La mienne, dont les retours de terrain par les référents en Profilage alimentaire sont unanimes : la base est de manger des nourritures vraies, le terme que j’ai choisi pour qualifier des aliments originels, nobles, cuisinés chez soi ou chez un artisan respectueux. Il faut l'avoir vécu pour le comprendre, mais le recours à ces "nurritures vraies" (ma terminologie) est thérapeutique en soi. Au plan mental, au plan physiologique.
Ma difficulté : continuer à promouvoir ce modèle si générateur de santé, en pointant l’une ou l’autre figure médiatique et scientifique qui soutiendrait un modèle approchant, sans exclusions.
Je suis en train de terminer le livre de Chris van Tulleken, déjà présenté dans un précédent billet. J’en fais une recension sous peu. Plus que 50 pages à lire, puis le plus dur : construire le billet. Patience. (NB fin mars: c'est fait, lire la première partie).
En attendant, une amie dentiste m’a rappelé l’existence d’un autre médecin britannique médiatique qui s’avère être un de ses amis proches, marié à une Belge : Tim Spector, spécialiste en génétique et fondateur d’un programme de nutrition automatisé, qui individualise les conseils selon le mangeur. Je ne le connaissais que vaguement, honte à moi. J’ai donc passé quelques heures à l’écouter avec attention, en tissant mes dernières créations; puis à le lire et à parcourir le blog/site.
A côté de van Tulleken, je pense que notre groupe de profileurs, réunis au sein du réseau Profilage alimentaire, ont trouvé ici une figure médiatique qui confirme notre pratique.
Tim Spector est impressionnant par son calme, son respect de l’autre dans les interviews, son esprit méthodique et rigoureux qui documente tous ses énoncés.
En quoi le discours de Tim Spector sera utile pour les référents en Profilage alimentaire ?
Tim Spector est un spécialiste du microbiome et de son impact sur la santé, ce qui nous pousse à l’inviter au sein du club de l’Assiette ressourçante. Dans quasi chaque topo, je mentionne le monde microbien qui nous habite (qui nous gouverne ?) et la raison pour laquelle il faut le choyer pour vivre mieux vieux, pour mieux gérer le stress, même. On ne se focalise pas outre mesure, mais on prend conscience de ce que nous ne sommes pas seuls à gérer cette belle machine de vie.
Quel bonheur d’entendre une telle pointure en recherche rappeler que compter les calories est une absurdité et que faire du sport ne fait pas maigrir. L’exercice nourrit le cœur, relance le système hormonal et diverses fonctions, mais ne fait pas mincir.
Hélas, l’appel de la magie dans nos sociétés est tel qu’on est prêt à croire à n’importe quoi. Tout rituel nutritionnel vaut, s’il peut remplacer le vide des rituels religieux…
L’écouter par exemple en interview chez The Diary of a CEO : https://www.youtube.com/watch?v=66hWntvp0_4&t=1055s
(français : cliquer en haut d’écran et demander les sous-titres français (smartphones) ou roue des paramètres en bas (PCs))
Cette longue entrevue de janvier 2023 vous donnera d’ailleurs un aperçu sur sa posture en nutri. 1h30.
Tim Spector est courageux de se poser calmement, droit et vertical, face à la marée de discours magiques en nutrition. Il est bien normal que nombre de personnes, dans notre monde en déshérance de religieux, se tournent vers l’assiette comme source de rituel. Phénomène qui profite à tous les gourous, qui se nourrissent alors de cette demande.
Ceci étant posé, Spector fait face, mais il n’est pas un rebelle pour autant , comme on le verra dans la partie 2 de l’article. Il suit le grand récit médiatique sur certains points.
Le discours de Spector confortera ceux qui, comme moi, sont l’exception : je chante les vertus des aliments-source, nobles, non par effet magico-religieux, mais pour leur bénéfice flagrant sur le bien-être physique et psychique. Il plaira moins à ceux qui sont encore dans un rapport magique à la nutri.
En quoi peut-on dire que Spector ne suit pas les processus magiques qui ont cours en nutri ? Il démontre que, parmi les « intolérants au gluten », la toute grande majorité ne l’est pas, ce que je chante aussi depuis des années.
Il déconseille, sauf cas précis définis médicalement, des modes durs comme la cétogénique en permanence. Il l’accepte pour des périodes de transition. Amis du Profilage alimentaire et de l’Assiette ressourçante, nous nous retrouvons là en famille ! Dans mes topos, j’insiste pour que les cures alimentaires que je propose ne soient que cela : des cures temporaires. J’ai déjà documenté les sources scientifiques qui démontrent qu’en seulement quinze jours on peut, par exemple, soulager un foie gras (NAFDL/NASH). Nul besoin de s’enfermer dans un mode contraignant en permanence, sauf si c’est un chemin initiatique pour le mangeur X à un moment T.
Je fais mon travail d'éducateur de rue du net, là où Spector fait son travail de chercheur: je donne les outils à monsieur et madame ToutleMonde pour se reconnecter à sa propre nature, avec des outils simples. Ensemble, les chercheurs et les éducateurs de rue offrent de belles possibilités au public, non?
Joie parmi les joies, enfin un spécialiste de la nutri qui confirme notre discours en Assiette ressourçante et Profilage alimentaire : les vitamines en gélules sont inutiles ; elles sont inopérantes; chez certains sujets, elles fatiguent l’organisme au lieu de le ressourcer. Une assiette variée, riche en produits frais, non ultra transformés, suffit à fournir tous les minéraux et vitamines nécessaires. Avec quelques exceptions, comme la Belgique dont il semble que le sol manque de sélénium ; en conséquence de quoi la majorité des Belges ont des soucis de thyroïde. Ce qui ne demande qu’un peu d’iode chaque jour.
Il est très courageux de reconnaître les points de rupture dans son discours ces dernières années. Par exemple, pendant des années, il a conseillé le pain complet, de toute provenance, pour sa teneur en fibres. Il en revient. Idem pour son rapport au bio : des études le poussent à changer d’avis et à le conseiller. Ouf ! Et, à nouveau, on lui souhaite la bienvenue au sein du club Assiette ressourçante, qui tient le même discours. Quand je vous disais qu'on est entre amis!
Petit détour par de la psycho de base, sans préjuger du réel (j'émets une hypothèsee): à ce que j'ai compris, Spector s'est intéressé récemment à la nutrition à la faveur d'un problème de santé majeur (cardiaque? me souviens plus). Un médecin conventionnel comme lui, chez nous en tout cas, n'a AUCUNE heure de formation dans ce domaine à la fac'. Parfois, il découvre ce domaine par lui-même, à plus de 50 ans, comme dans ce cas de figure-ci - et ce, en passant par les mêmes formations, livres et ateliers que tout un chacun, comme je le fis à 38 ans après le cancer, mais avec le bagage intellectuel d'un médecin averti vu son âge.
Cumulons noviciat et peur pour sa santé: c'est le combo idéal pour prendre à la lettre les injonctions nutritionnelles (boire beaucoup, virer la viande, manger des fibres, etc; les vieilles rengaines sans fondement). Ce fut mon cas, j'ai viré "kousminienne" à fond pendant 5 ans, j'ai répété les rengaines de Kousmine pendant quelques années. Il se pourrait bien que les revirements de Spector sur le plan nutritionnel soient l'effet naturel d'un métier qui rentre avec les heures de vol, et du nécessaire arbitrage qui en découle, entre les dogmes nutritionnels et le réel observé sur le terrain.
Depuis peu, l'ami Spector a d'ailleurs compris à quel point, plus que des changements d’aliments, c’est un changement de qualité qui importe dans les achats alimentaires. J’imagine que van Tulleken, déjà cité, fait ses analyses dans le centre spécialisé en étude des jumeaux que préside Tim Spector ; et que la fréquentation de van Tulleken lui a ouvert les quinquets sur une réalité que quasi tous les conseilleurs en nutri omettent : les aliments ultramanufacturés ou AUT (ultra processed food, ou UPF) produisent des états inflammatoires et d’addiction dans la plupart des organismes. Si l’on veut calmer un état inflammatoire et se désintoxiquer de cette addiction, le tout premier pas en transition est de passer à ce que j’appelle nourritures vraies.
Dans le livre éponyme, ma définition des « nourritures vraies » est radicale, car j’engage le mangeur à passer une cure de quinze jours en cette forme d’assiette ressourçante afin qu’il en sente le bénéfice au plus profond des cellules et du cerveau. A suivre ce mode alimentaire en rythme de croisière, on peut évidemment s’autoriser des sorties de route ;)
Le billet sur le livre de van Tulleken sera plus explicite sur le sujet.
Au cours de ses recherches, l'auteur de "Food for life" s’est vite rendu compte de la vanité d’un mode alimentaire « prêt-à-porter ». Depuis peu, il a formalisé l’individualisation via son programme Zoe Predict. https://zoe.com
Quel délice de découvrir que des nutritionnistes classiques envisagent une posture holistique, qui était au préalable le champ réservé aux naturos:
Annonce traduite par robot: Nous adoptons une approche holistique pour comprendre le fonctionnement de votre corps.
Nous utilisons les tests les plus avancés et la science de pointe disponibles pour vous aider à comprendre comment votre corps fonctionne afin que vous puissiez réduire l'inflammation alimentaire et améliorer votre santé intestinale naturellement.
Basé sur les tests utilisés dans PREDICT, notre kit de test à domicile peut fournir des informations complètes sur votre biologie, couvrant le microbiome intestinal et vos réponses glycémiques et lipidiques sanguines.
Je ne m’étends pas sur le sujet car je n’ai pas testé le programme. Je ne le conseillerai pas non plus, vu le prix exorbitant et le fait qu'une anamnèse de bon sens, bien menée, peut aussi bien guider vers le bon plan pour chacun. Certes, ils doivent payer leur équipe, le labo, les intervenants. Mais pour une petite anarchiste de gauche, ces tarifs sont décourageants, vu que seuls les possédants y auront accès. Grrr.
Par ailleurs, je pense que tant de variables interviennent qu’il est virtuellement impossible, même à l’aide d’I. A. , de définir un programme adapté. Je privilégie le bon vieux colloque individuel, bien plus riche en informations.
En outre, je ne sais sur quels paramètres se base leur programme. Ils testeront les lipides circulants, mais lesquels ? Les triglycérides ? Auquel cas cela se fait en test de labo une fois l’an, sur prescription de votre médecin ; un éventuel taux élevé se règle par un petit changement alimentaire, dont on contrôle l'efficacité sur les triglycérides après 15 jours. Le cholestérol ? Ce qui signifierait que cette équipe croit encore à l’hypothèse cholestérol, si désuète ?
Et enfin, je gage qu'aucun de ses paramètres n'aurait pu m'aider à découvrir ma nature de Tarass Boulba, pour qui la meilleure des cures, celle que j'utiliserais si j'avais une rechute de cancer, est... la cure carnivore; et dont le régime de croisière est carnicentré - seul mode alimentaire qui me permet de calmer l'inflammation qui est devenue chronique dans un vieil organisme fatigué de lutter (malade depuis ma naissance, je suis devenue un Reader's Digest des affections). Ceci dit, aucun autre praticien n'aurait eu cette idée non plus, ce profil est assez rare.
J’ai lu qu’au sein du programme Zoe, ils testent la glycémie de l'amateur à l’aide d’un testeur permanent (achat en pharmacie 70€ si ça vous amuse, tableaux de suivi à télécharger de mon site si cela vous amuse encore plus). Cela se fait aussi avec un glucomètre, qu'on ne doit même pas acheter. Vous êtes à deux clics d'une relation qui en a un, inutilisé. Empruntez-le, payez les variables et roule ma poule. En quinze jours, vous aurez un topo sur votre réactivité particulière à la glycémie.
Par ailleurs, il se pourrait si je suis les travaux de l’équipe de Segal (Israel) que l’augmentation de la glycémie n’indique pas systématiquement une mauvaise gestion des sucres, mais bien une réactivité à certains aliments, en lien avec la qualité du microbiome. Voir mon billet sur le sujet « Les réponses glycémiques: c'est très perso »
J’en profite pour continuer sur ma spécialité : in cauda venenum. Enfin, soyons moins provocateur : passons au revers de la médaille en or. Je tempérerais la référence au discours de Tim Spector par quelques remarques.
MENUS TYPIQUES. Je me répète: je n'ai pas testé le programme Zoe. J'ai parcouru avec attention le site, en revanche. Je vois par exemple les 10 meilleurs petits déjeuners des amateurs du programme. Un petit coup d'oeil en pensant à mon cas perso: sur les dix choix, TOUS me feraient me trainer toute la journée, ballonnée au surplus. Est-on vraiment dans de l'individualisation? Où sont les choix pour les profils omnivores et ascendant vata en ayurveda qui ont besoin, fondamentalement besoin, de commencer la journée avec du bon pain bio et de la tomme de fromage au lait cru? Et qui ne prospèrent qu'en mode carnicentré? Les conseils ne seraient-ils pas trop influencés par un Christopher Gardner, que je vois dans le panel et dont, pour l'avoir suivi, j'ai repéré qu'il est un profil végé, ce qui obscurcit sa posture de scientifique rigoureux. Humain, oh, trop humain.
Hors mon cas perso, un coup d'oeil aux dîners favoris des participants: les protéines ne sont pas dosées, et elles sont au principal de source végé. Ce sont des repas pour une cure d'entrée vers une assiette riche en aliments frais. Cure, donc temporaire, intenable sur la durée. Ou ce sont des repas de croisière pour les bien-portants, dont l'organisme ne peine pas à métaboliser le végétal. Paradoxe: qui, parmi les bien-portants, est prêt à dépenser un tel budget et un tel temps pour réformer son assiette? J'imagine uniquement mes soeurs en malheur, càd celles que j'appelle les madonnes: celles qui, blessées et déçues par le dernier régime minceur, cherchent le miracle dans la diète suivante: elles peinent à perdre deux kilos en deux mois d'efforts inouïs... puis en reprennent quatre dès l'arrêt de la torture. Le vieux refrain des régimeux, que je fus longtemps.
Je ne doute pas un instant de la sincérité des témoignages sur le site. J'aimerais entendre les mêmes après un an... Une transition alimentaire vers des aliments frais, de quelque nature qu'elle soit (même trop végé pour un mangeur X), produit toujours une révolution cellulaire lorsque le corps a été nourri au principal d'UPF. Mais sur la durée?
Revenons au cas spécifique du discours de Tim Spector: il semble croire le récit climatique - qui n’est qu’un récit, une jolie légende, en particulier quand on incrimine l’élevage (NB: on peut être écolo convaincue et être alarmosceptique; ou Gieco-sceptique comme j'aime à me présenter). Je ne m’étends pas, j’ai écrit de longues pages rationnelles, documentées, pour illustrer que l’élevage est non seulement innocent, mais qu’il peut aussi contribuer à améliorer la santé notre planète. C’est Lactalis et consorts qu’il faut pointer du doigt, pas les éleveurs.
Nul besoin d’acheter mon livre « Le bœuf émissaire », les brouillons sont encore sur le blog. A vous de chercher… En bonne pédagogue, je ne donne pas la becquée, je prépare des jeux de piste ;)
Rien de plus humain que cette volonté de croire, quasi religieuse, chez un scientifique pur et dur. La fable du développement durable est parfaite en l'occurrence, car elle en appelle au désir de "sauver la planète"; idéal pour un médecin, attaché à sauver son prochain.
Curieuse dissonance cognitive, me direz-vous? Je me l'explique assez facilement. L'attachement à "la" science pure, aux méthodes froides et analytiques, ne peut qu'instiller un désir de magie chez n'importe quel humain, le pousser à croire sans vérifier, car l'homme est ainsi fait qu'il est une combinaison de Didier Raoult et de Madame Irma.
Cette dissonance cognitive se repère en particulier chez les médecins qui savent, profondément, mais ne le reconnaissent pas oralement, que leur "science médicale" n'est qu'un art. Je m'amuse de voir, chez mes amis médecins, leur manque de rationnel quand ils chantent certaines chansons. Exemples: tu dois prendre du calcium pour l'ostéoporose, n'oublie pas de surveiller ton cholestérol, les vaccins sont efficaces, les chimios guérissent du cancer.... etc... à quoi je leur rétorque: "ne me dis pas que tu crois aussi que la terre est plate?". Vous êtes étonné qu'on ne m'invite plus dans les dîners en ville? J'ai beau blaguer avec eux, la pilule passe mal, car ça grince trop dans leur ego de grand mamamouchi (posture qui leur est un peu dictée lors de leurs études, mais qui est surtout en lien direct avec la vénération ébahie des patients, comprenons-les, qui résisterait? lire mon billet Médecine : religion des temps modernes ?).
Tim Spector semble croire aux bénéfices des fibres, il en chante les vertus pour tous. Or, soyons logiques, si l’on est convaincu que nous n’avons pas tous la même biochimie, càd la même organisation sociétale interne de nos divers virus, bactéries et levures, les mêmes fréquences de communication même, il serait logique d’imaginer que toutes les populations microbiennes ne gèrent pas aussi bien les fibres les une que les autres.
Illustration sur le terrain par le nombre de profils inadaptés aux fibres et qui s’en portent comme un charme ; et par le nombre de personnes momentanément fragilisées (les fameux « burn out » ou « post-covid ») dont l’organisme n’arrive plus à métaboliser les fibres. Naturelles ou ajoutées par les industriels, peu importe. Ces personnes doivent hélas éviter les fibres dures des légumineuses et des oléagineuses, en particulier - or, ces aliments sont survantés en Naturoland et chez Zoe.
Ce qui nous amène au point suivant : le docteur Tim Spector, comme quasi tous les chefs de file en nutri, semble généraliser à tous ce qui lui convient personnellement. Eh oui, tout paradoxal que cela paraisse. Même en prônant en parole l’individualisation, sa réaction instinctive dans les faits est de conseiller ce qui lui va ! Il est très probable que ce soit ce plan très naturo qui l'a remis sur pied.
Ma longue expérience du décodage des profils , nourrie par 20 ans d’observations sur le terrain, me pousserait à le classer dans les profils adaptés à l’assiette semi-végétarienne, telle que je la définis dans Nourritures vraies, en lui ajoutant une bonne part de graisses saturées. Ceci convient certes à quasi tout le monde, dès que ces mangeurs sortent de la malbouffe, le temps de se requinquer. Mais, en rythme de croisière, cela ne convient qu’à environ un tiers de la population .
Tim Spector rejoint là le dr Anthony Fardet, dont je chante les louanges dans mon livre Nourritures vraie, chercheur français dont le discours pâtit hélas du même défaut : il conseille à tous un plan très « plant-based ». Cette expression anglaise n’a pas d’équivalent en français, car « plant » signifie aussi bien plante qu’usine. Or quantité de mangeurs végé se nourrissent de concoctions industrielles « parce qu’elles sont bonnes pour la planète », sans se rendre compte que burger d’insectes, lait de soja & Cie sont des ravageurs de la biodiversité. J'attends de rencontrer les jeunes végé qui cuisineront des produits frais, comme exposés sur la photo ci-dessous. Ils privilégient le prêt à manger... riche en AUT - ou Produits Ultratransformés, terme que mon fils préfère car en abrégé cela lui permet de m'annoncer qu'il va aux PUTs quand il va au McDo ;)
Bref. Je ne vais pas répéter ce qui est exprimé dans les plus de mille pages de mon blog et dans mes nombreux topos. Il suffit d'observer cette vague américaine du carnivorisme, programme extrême s'il en est. Je gage que ces néocarnivores sont en fait des carnicentrés déçus, si pas écoeurées, du moult-fibres, moult-amandes etc. que l'on peut aussi repérer dans les conseils paléo.
Sur le site originel de Spector, il ne cache pas ses cartes, d'ailleurs. Illu en une image, extraite de ce site:
C'est humain, il veut plaire, il veut publier. Donc il doit jouer le rôle attendu dans notre psychodrame actuel en nutri. Où voyez-vous des protéines sur la table dans cette jolie photo? A l'heure où l'une des carences récurrentes est enzymatique, les protéines sont capitales, pourtant.
Ces chefs de file et moi-même, par extension les référents en Profilage alimentaire, différons en ceci : nous sommes conscients que 10 à 15 % de la population est trop fragilisée, de naissance (défaut génétique) ou par acquit (fragilisation par rupture de tolérance face à la pollution) pour suivre des conseils tout-venant, en particulier tendance végé. Parmi ces 10 à 15%, j’inclus ces profils atypiques que sont certains mangeurs hypersensibles, qu’ils soient par exemple des canaris de la modernité (défaut génétique de naissance) ou des physiologies atypiques (par exemple les fameux HPI, les vrais). Dans ces derniers cas, seul le mangeur peut définir ce qui lui convient, car je n’ai encore trouvé aucun dénominateur commun qui puisse les aider.
Or, à ce stade de mon écoute, je ne repère pas que Tim Spector et le programme Zoe envisagent ces cas extrêmes. Ils ne semblent pas être au courant que, parmi la toute jeune génération, un nombre impressionnant de gamins semblent fragilisés déjà tout petits. Leur conseiller un plan végé peu protéiné est presque une prescription de malheurs à venir. Si la photo reflète sa pensée et n'est pas qu'un truc médiatique, Spector a dû être bien nourri dans sa jeunesse ET être de profil végé de nature pour se permettre un plan pareil. Pensons aux cas divergents et versons une larme sur leur éventuelle crédulité.
Le cas des aliments fermentés. Ces mangeurs qui sont fragilisés ou qui sont atypiques auront bien du mal à profiter des vertus des aliments fermentés, vertus que je chante tout comme Spector, mais avec un bémol: ce sont des "précieux", mais pas pour tous les mangeurs.
On comprend qu’un chercheur doit se référer à des études, des faits, des données. Mais la physiologie de la digestion a encore de beaux progrès devant elle. Disons qu’elle a un beau potentiel d’amélioration, façon élégante de dire que la science nutritionnelle est encore à ses balbutiements, on ne peut lui faire confiance aveugle.
On est tentés de suivre des chercheurs, comme on est tenté de « suivre LA science » comme si c’était une idole païenne. Il est judicieux de, parfois, tempérer cette tentation en se rappelant que, chacun, nous différons des autres êtres humains et qu’aucune étude ne peut nous dicter un programme.
Je n’ai pas tout lu, mais j’ai beaucoup écouté ses interventions au sein de la chaine Zoe (son programme nutri), où il est interviewé par Jonathan. Je tisse et je teins beaucoup, moments où j’ai l’occasion d’écouter des podcasts. Pendant ces intervention, je n’ai pas relevé que Tim Spector mentionne un élément essentiel aux yeux de tout praticien de terrain en nutri : nous avons tous un petit diable personnel, qui freine nos élans de bienveillance envers nous-même. Il est illusoire de croire que chacun pense dès le matin à manger sainement pour vivre plus vieux, ou pour vivre mieux vieux. Car son petit diable lui parle plus souvent qu’à son tour…
Une transition alimentaire n’est tenable que si l’on travaille aussi sur le plan des neurosciences, ne fut-ce que par la pratique de méditations sur le sujet de la bienveillance.
Je me répète: Tim Spector est impressionnant par son calme, son respect de l’autre dans les interviews, son esprit méthodique et rigoureux qui documente tous ses énoncés. Rare en nutrition. J’invite à lire l’un de ses livres :
Ou à écouter une série de vidéos sur sa chaine ZOE, où il intervient avec une très sympathique chercheuse, la docteur Sarah Berry, qui partage sa volonté de ne s’exprimer qu’à base de faits scientifiques et documentés.
Le suivre sur X : @timspector ou lire son substack: Gut Feelings with Professor Tim Spector
Mes topos et mon système d'assiette ressourçante doublée d'une approche intuitive (l'écoute de soi), le travail des référents en Profilage alimentaire, ne s'opposent pas à cette pratique. Nous offrons une vision complémentaire, plus axée sur le travail de détective intérieur. Ce mangeur qui serait titillé par le concept de personnalisation de ses menus aura donc les deux choix. Elle est pas belle, la vie?
Tempérez cependant certaines assertions un peu catégoriques (comme le tout-végé) par l’écoute de soi, l’observation du terrain. Vous seul habitez 24h/7j dans ce corps, vous seul le connaissez mieux que quiconque. A la rigueur, faites une petite cure de quinze jours pour tester la validité de certaines hypothèses. Cette première quinzaine sera le tremplin pour vous ouvrir à l’alimentation intuitive, un chemin qui peut prendre quelques années… et qui vous révèlera que, tout compte fait, aucun plan alimentaire prémâché ne vous convient, finalement.