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6.12.25 (oublié de publier le 21.3.2025) Ce dossier cancer s'adresse aux profanes, qui voudraient s'informer avant d'être diagnostiqués et donc avant d'être tétanisés par cette annonce. Dans un échange de forum récent, je tombe sur un cas-typique de cancéreux qui semble très sûr de lui alors qu'il mélange les sources (études ou profanes: tout vaut tout), en outre sans les vérifier. On le comprend: profanes, nous ne sommes pas éduqués à compiler la documentation scientifique - littérature qui est devenue si foisonnante et si volumineuse qu'il est d'ailleurs difficile pour un pro de faire le tri. Où il sera question du protocole Martinez et d'un auteur fantasque (Jane McLelland).
Ce dossier s'adresse aux profanes, qui voudraient s'informer avant d'être diagnostiqués et donc tétanisés par cette annonce. Dans un échange de forum récent, je tombe sur un cas-typique de cancéreux qui semble très sûr de lui alors qu'il mélange les sources (études ou profanes: tout vaut tout), en outre sans les vérifier.
J'utilise cet exemple comme prototype du profane qui se prend pour un chercheur. On en verra un autre exemple plus loin, avec le cas Mc Lelland.
Je dépiaute point par point comment je peux dire que les assertions de cet internaute semblent un peu trop fermes pour un profane quand il critique le protocole de Pierrick Martinez et al. : "la préconisation du régime cétogène est pour le moins très controversé d’une manière générale (tous types de cancers confondus) en cas de cancers" (je ne voudrais pas faire de l'ad hominem, ceci est un exemple, je garde l'auteur anonyme, celui qui voudra trouver cherchera - le protocole Martinez était publié sur le site d'AIMSIB).
L'internaute se justifie: "En 2016, l’équipe d’Olivier Feron (Institut de Recherche Expérimentale et Clinique), spécialisée en oncologie, montre que les cellules qui se retrouvent dans un microenvironnement acide (acidose) au sein des tumeurs, remplacent le glucose par les lipides comme source d’énergie pour se multiplier."
Ce n'est pas cela que l'étude démontre. Je l'ai survolée car je suis aussi profane, mais l'étude, hypertechnique, n'envisage pas les lipides alimentaires ni les régimes. L'internaute a lu un résumé dans Dailyscience dont il donne la référence, mais il vaut mieux toujours lire la source -> https://www.nature.com/articles/s41467-019-14262-3
On y lit: "In conclusion, the identification of an autocrine TGF-β2-LD axis led us to expand on the driving role of acidosis on metabolic adaptation in cancer cells but importantly to identify new prophylactic and therapeutic perspectives to reduce metastatic burden and thereby extend cancer patient survival." Rien à voir avec l'affirmation ci-dessus.
D'ailleurs, le très pointu Pierrick Martinez, auteur d'une récente publication sérieuse à multisignatures sur un nouveau protocole de traitements, lui répond sur cette étude:
"Les acides gras puisque vous les citez ne sont ni nécessaires ni suffisants à la croissance des cellules tumorales (https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/7882338/). La synthèse d’ATP à partir de l’oxydation des acides gras ne se produit que si OxPhos est intact. C’est pourquoi une accumulation de gouttelettes lipidiques est observée dans de nombreux cancers (notamment les cancers avancés). L’insuffisance d’OxPhos, qu’elle soit due à l’hypoxie ou à des anomalies mitochondriales, peut entraîner l’accumulation de gouttelettes lipidiques dans le cytoplasme (https://doi.org/10.1007/s43152-024-00057-2xxxEnfin, pour ce qui est du régime cétogène, je connais très bien les travaux du Dr. Maurice Israel. J’ai étudié plusieurs centaines de cas de guérisons spontanées, dont la plupart avaient en commun un changement alimentaire de type végétarien ou ancestral (http://www.raleightime.com/gerson-library/medpack/lifestyle-changes.pdf). Je vous invite également à lire cet ouvrage du Dr. Turner, qui a étudié plus de 1000 cas de guérisons spontanées (https://www.fnac.com/livre-numerique/a6993499/Kelly-A-Turner-PhD-Radical-Remission). Il est important de mentionner que les régimes cétogènes proposés dans la littérature peuvent être différents (https://pmc.ncbi.nlm.nih.gov/articles/PMC7056920/) et il faut donc être prudent concernant les conclusions que nous tirons. Le Pr. Seyfried a affirmé qu’il fallait avoir un taux de cétone suffisamment haut et un taux de glucose suffisamment bas (GKI <2) pour inhiber l’apport énergétique nécessaire aux cellules cancéreuses (doi: 10.1186/s12986-015-0009-2). Je tiens à préciser que je ne suis pas un ‘partisan’ d’une approche spécifique. À mon humble avis, le jeûne demeure l’alternative la plus efficace, bien qu’il ne soit pas accessible à tous. Dans ces situations, il est important de compenser en adoptant d’autres stratégies nutritionnelles et en utilisant des médicaments capables d’inhiber les principaux carburants."
Pour soutenir ses assertions, le même internaute pointe un article de l’UDNF (Union des nutrithérapeutes francophones, qui n'a rien d'officiel, qui est une association de personnes): "Régime cétogène & Cancer => DANGER". Il ne sait probablement pas que quasi aucun nutrithérapeute n'utilise la nourriture comme thérapeutique, ils préfèrent les compléments alimentaires. Je n'en connais pas beaucoup qui donnent des conseils avisés en nutrition. Parfois: "alimentation saine", ce qui ne veut rien dire, c'est un mot-valise et on y met ce qu'on veut; souvent: "alimentation saine, sans gluten sans laitage", qui est un mantra sans fondement pour la plupart. Et c'est bien normal: les nourritures vraies, bien ciblées selon la personne, bien menées en rotations et en minicures, évitent d'avoir recours à l'arsenal des compléments. Favoriser les premières serait un coup de couteau dans leur profession de foi, pusqu'ils vivent de la vente de compléments.
En outre, si ces nutrithérapeutes ont été formés au célèbre C., ils répètent les mantras du maître à penser, qui est à ma connaissance un militant végé actif (irrationnel sur ce plan-là). Toute forme de recours à l'animal est donc "pro-inflammatoire", puisque c'est le cas chez lui, dans son profil perso.
Pour dire le sérieux de cet article, je cite quelques unes de leurs affirmations gratuites. Ils ne citent aucune source d'étude qui confirmerait de telles assertions.
"1. Les acides gras sont également des nutriments privilégiés par les cellules cancéreuses.
2. Les cellules cancéreuses se servent des graisses saturées, y compris celles de l’huile de coco, pour se «blinder» contre les attaques des substances corrosives émises par les globules blancs, les chimio- et les radiothérapies.
4. Une alimentation riche en graisses et en protéines animales est pro-inflammatoire."
Ce sont des postulats, sans preuve. Pour le point 4, je souris à imaginer le nombre croissants de carnivores américains qui sortent enfin de leur enfer de santé par cette voie (inopportune chez nous, je vous rassure).
"8. S’ajoute à tout cela que l’un des effets secondaires les plus fréquents du régime cétogène est de donner des nausées."
Voilà ce que c'est que de se prononcer sur un sujet qu'on ne connaît pas. Si le mangeur pratique la cétogène avec des huiles végétales, vu les doses de lipides en cétogène, il aura forcément des nausées, la vésicule n'aime pas ces excès. Une vraie cétogène se fait au principal avec des graisses saturées.
Une référence à une association de non-médecins ne me paraît pas une source fiable.
Ce critique de la céto en cas de cancer fait mention ensuite d'une étude, où le professeur Israel déconseille la cétogénique sur la foi d'hypothèses qu'il émet sur base de sa profonde connaissance de la biologie, ciblant l'enzyme SCOT entre autres. Pas d'expérience in vivo ou in vitro. Hypothèses, donc, ce qui demanderait une étude en bonne et due forme; hypothèses qui ont été démontées par une équipe de chercheurs allemands experts en céto/cancer.
Dommage qu'Israel se refère aux expériences de Wilhelm Brünings il y a 80 ans, qui a été déçu par la pratique de la cétogène de l'époque sur les cancéreux (à cause de rebonds, lire la source, càd l'article de Kelment "Wilhelm Brünings' forgotten contribution to the metabolic treatment of cancer utilizing hypoglycemia and a very low carbohydrate (ketogenic) diet" ).
Faut-il chercher si loin pour trouver des défauts à la cétogène en cas de cancer? Que Brünings pratiquait en adjoignant une thérapie par l'insuline, sans autre traitemen, sur des cas incurables. Pourquoi comparer des pommes et des serviettes? Aujourd'hui je ne connais personne qui se soigne uniquement avec la cétogène, elle est toujours accompagnée de divers produits ciblant la tumeur.
Le lecteur qui serait intéressé par cette théorie lira un compte-rendu de démontage par Jérémy Anso, docteur en biologie, sur son: "L’incroyable Saga autour du régime cétogène et de l’enzyme SCOT" (mai 2020). Par ailleurs, Seyfried et al. ont démonté cette fable de la céto nourrissant la tumeur.
La cerise sur le gâteau: cet internaute cite Jane McLelland, auteur d'un livre récent "Affamer le cancer", et il la place sur le même pied que les scientifiques qu'il cite comme Israel et Feron: "Or la voie énergétique des AG est essentielle et prépondérante (en regard du glucose, de la glutamine et d’autres acides aminés) dans le processus métastasique (...). Il est important de faire référence à la « metro map » (triangle « glucose/glutamine/acides gras ») dans le célèbre livre de Jane Mc Lelland : « affamer le cancer »."
Dans le contexte du dossier, j'ai déjà précisé plusieurs fois que cette dame est une profane comme moi. On l'écoute comme on écouterait une copine. Point barre.
Malgré mon historique proche du sien, je n'ose pas affirmer avec autant d'assurance qu'il faut faire ceci ou cela, ce qu'elle fait de manière assez péremptoire à mes yeux. Je relaye simplement des avis informés. Cette dame est kiné et se dit "de formation scientifique". Soyons sérieux, et pardon à mes amis kinés et ostéos, mais ils sont les manuels de la médecine! Je ne mettrais donc pas McLelland sur le même pied que le professeur Seyfried ou le docteur Makis. Même les médecins ne sont pas tous à même d'analyser les études et d'en tirer des conclusions avisées. Alors imaginez une profane, même "kiné"!
Je viens d'ailleurs de lire son livre "Affamer le cancer" et j'en sors un peu confuse. Je suis son groupe facebook depuis quelques mois, car il est enthousiasmant pour un cancéreux de lire les témoignages de réussite des participants.
Je ne conseille pas son livre: il est confus , il n'y a pas d'index (comment s'y retrouver?), on doit sauter de longs passages qui n'ont rien à voir avec "comment j'ai gagné contre le cancer": passages qui tiennent du magazine féminin (comment j'ai lancé mon entreprise, comment j'ai rencontré mon mari, comment j'ai fait appel à une mère porteuse ).
Je ne connais pas son éditeur , mais elle n'a clairement pas été guidée: si son histoire est un beau tremplin pour donner envie à chacun de se prendre en main et justifie un livre, je ne comprends pas que l'éditeur l'ait laissée élaborer sur la fin des théories assez tirées par les cheveux, pinaillantes, et donner des conseils catégoriques alors qu'elle n'est pas du métier (ni médecin, ni nutritionniste).
L'auteur nous dessine des tableaux de type coaching, alors qu'on est dans un domaine bien plus sérieux que le simple bien-être: les lecteurs essaient de survivre à des cancers de grade 4, graves. Des petits tableaux simplifiés comme une "metro map" n'ont rien à voir face à une maladie très complexe et multiforme, que vivent des personnes de profils très différents. Il faut d'ailleurs avoir le coeur bien accroché pour lire les feedbacks de ses suiveurs sur le groupe fb: on est atterrés de lire les 60 compléments qu'ils prennent par jour, croyant que c'est anodin.
Rayon nutrition, son discours est d'un flou! Elle a picoré à gauche et à droite, en mélangeant les systèmes et les paramètres. Sa propre pratique est aussi floue: se baser sur l'index glycémique est un réflexe de débutant, or elle a bossé le dossier de longues années, elle aurait pu vite comprendre, comme beaucoup de pratiquants, que ce concept d'index glycémique est très aléatoire et peu efficace. Dès qu'elle a compris qu'il fallait calculer les doses de glucides, elle ne semble même pas avoir fait des tests domestiques pour évaluer sa propre glycémie. C'est le B.A.BA du cancéreux, pourtant. Le glucomètre coûte 26€, ce n'est rien. On peut même en emprunter un, vous êtes à 3 clics d'un copain qui en a un dans sa pharmacie, inutilisé.
Confusion encore: on ne comprend pas vraiment ce qu'elle a vécu, c'est en lisant un blog extérieur, par un néerlandais, que j'ai capté la chronologie. En outre, McLelland prétend avoir eu une leucémie, mais elle annonce dans le livre que ce diagnostic a été posé par un analyste de sang vivant (microscope à fond noir) - pratique que je valorise, certes, même si elle est décriée par les praticiens mainstream; mais pratique qui demande un intervenant hors pair: les rouleaux qu'elle a vus sont une marque de stress oxydatif ou de déshydratation, et non de leucémie. D'ailleurs, pas de trace de confirmation clinique de cette leucémie. Questionnée sur le sujet chez Ralph Moss, elle évite la question. Serait-elle, comme beaucoup aujourd'hui, une amateur du virtuel au point qu'elle oublie le réel (ceux qui lisent entre les lignes devineront le mot que j'utilise en direct).
Sur ce thème, j'arrive à peine à croire qu'avec tous les médicaments et produits qu'elle a pris en forme de tests, elle n'ait eu aucun effet secondaire, alors qu'elle est fragile apparemment (tombée à l'eau lors d'une régate en Turquie, elle a bu la tasse et en a été gravement malade... ???).
Je regrette qu'étant victime d'effets indésirables des chimios, la dame généralise le cas à tous, ce qui pourrait effrayer certains pratiquants. Depuis 30 ans que je suis le sujet, j'ai rencontré tant et tant de cancéreux qui sont passés comme une fleur au travers des traitements. Pourquoi être si catégorique?
La période actuelle est ouverte à toutes les confusions de genre, ceci en est un cas de figure concret: une profane qui se croit sincèrement une grande chercheuse, alors qu'elle a lu quelques études. Je retrouve le cas de mes copains qui m'envoient un "une étude dit que" à tout bout de champ. Ils n'ont lu que l'abstract, ils ne connaissent ni ne jugent le ranking de l'équipe ou du journal, ils ne connaissent pas les arcanes des luttes entre facs, etc. Un vrai chercheur lira cent études, mais sur un seul produit à la fois; et croisera bien sûr les sources, qu'il aura vérifiées au préalable (casse-pieds au possible: il faut vérifier les sources des sources, ça n'en finit pas).
Confusion des genres, en toute bonne foi: imaginez qu'elle raconte s'être installée comme coach cancer et avoir par exemple accompagné un patient chez son oncologue pour dicter à ce dernier un protocole! On comprend qu'elle s'est fait virer du cabinet ;)
Autre raison de mon petit énervement pendant la lecture: elle en fait des tonnes, elle se pose en vraie drama queen. Ma meilleure amie, aussi rescapée mais de deux cancers*, a lu le livre et a eu le même sentiment que moi: ni elle ni moi n'en avons fait une telle chanson de Roland, désespéré, luttant seul contre la multitude. Ce ton d'autoglorification peut irriter quiconque n'est pas du monde anglophone, plus autocentré.
* Je suis une survivante de 31 ans, d'un cancer du côlon de grade III, très bien opéré, sans radiothérapie, sans chimio (quasi, arrêtées rapidement). J'ai peut-être eu des rechutes, mais je n'en ai pas connaissance, puisque je ne fais pas de contrôles.
La confusion vient aussi de ce que McLelland ose des affirmations péremptoires, alors qu'elle se réfère à UNE étude en bibliographie. La lecture de son livre m'a pris plusieurs heures (surtout à cause de l'écriture si confuse), mais j'aurai besoin de 3 jours pleins pour vérifier ses sources. Refrain connu, j'ai vu ce type de "cherry picking" mille fois en nutrition: on choisit UNE étude qui confirme notre pensée. Je voudrais comprendre par exemple sur quoi elle se base pour affirmer avec tant d'aplomb qu'il ne faut pas pratiquer la cétogène, car elle "nourrirait la tumeur". Parmi les trois diètes qui ont fait preuve d'efficacité pour accompagner les traitements (la céto, la Cure antifatigue alias le mode hygiéniste allemand à la Kousmine, ou le régime nr 7 des macrobiotes), choisissez la céto si vous vous sentez de profil plus omnivore que la moyenne. Ne vous privez pas d'un bel outil sur la foi de rumeurs, comme je l'ai déjà introduit dans mon billet précédent https://taty.be/cancer/KrumeurKD_fuel.html.
Bref: son livre "'Affamer le cancer", traduit en français chez Thierry Souccar éditions, est un bon roman pour qui veut se convaincre de se prendre en charge lorsqu'il veut accompagner les traitements conventionnels et une excellente piste pour découvrir des molécules repositionnées. Si l'on veut des conseils précis, des protocoles, je crains qu'il ne faille avoir recours à des professionnels. Comme l'équipe que je relaye demain.